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CONSTITUTIONS DE LA CONGRÉGATION

Les constitutions de la Congrégation de Saint-Victor de l’ordre des Chanoines réguliers de Saint-Augustin 

Elles ont été votées par le chapitre constituant le 28 octobre 1992, et approuvé par le Saint-Siège le 24 décembre 1993

«Saint-Victor est une des écoles mé­diévales qui, au XIIe siècle, ont le mieux parlé de l’Église [1]. Pour les Victorins, il n’y a de vie spirituelle que dans l’Église et par l’Église» [2]. Aujour­d’hui, les victorins nous invitent à ai­mer l’Église. Ils nous exhortent à la comprendre et à la servir de tout notre cœur, parce qu’elle est l’objet de l’amour immolé du Christ, et parce que nous sommes insérés en elle de façon vivante. C’est avec une grande ten­dresse, avec une passion dévorante, que nous devons aimer l’Église, peuple de Dieu né de la Trinité Sainte [3].

1 cf. Jean Chatillon, Une ecclésiologie médiévale : l’idée de l’Église dans la théologie de l’école de Saint-Victor in Irenikon 1949, pp. 115-138 & 395-410, p. 118 [2] ibid, p. 404 [3] Maurice Bitz, Propos sur la vie religieuse et l’idéal canonial T.2, Champagne 1990, pp. 93-94

PREAMBULE

-1-

Comme tous les hommes, les chanoines réguliers recherchent le bonheur. Baptisés, ils se savent appe­lés par Dieu au bonheur parfait qu’est la sainteté. Pour y accéder, ils accueillent avec confiance la pa­role du Seigneur qui promet la béatitude, dès ici-bas et pour toujours, à ceux qui sont humbles et pauvres, doux et soumis, affligés par leurs propres péchés, af­famés de la justice de Dieu, miséricordieux, purs et pacifiques. Malgré leurs faiblesses et leurs fautes, qui rendent si ardu ce chemin vers la joie, ils s’abandon­nent à l’action consolatrice de l’Esprit Saint, qui ne cesse de les assister de ses dons[1].

-2-

Par sa parole et par son Verbe incarné, par la Pâ­que de son Fils et le don de son Esprit, Dieu révèle aux hommes que le bonheur est accessible, et leur donne les moyens d’y parvenir. Innombrables sont les manières de vivre en chrétien, car Dieu appelle cha­que homme par son nom; mais il n’en est aucune qui ne passe d’une façon ou d’une autre par l’Église : dans son amour surabondant, Dieu l’établit gratui­tement comme seule dispensatrice des fruits de la Rédemption obtenue par l’unique médiateur, le Christ. C’est pourquoi les états de vie proposés aux baptisés sont des reflets de ce qu’est l’Église, Corps du Christ et icône de la Trinité, enveloppée du mys­tère de Marie, sa mère et son modèle.

-3-

Bien des fondateurs d’ordres religieux l’ont souli­gné en se référant à l’Église primitive décrite aux Ac­tes des Apôtres[2], et en privilégiant tel ou tel aspect de cette «vie apostolique» : concorde fraternelle et ser­vice, eucharistie et liturgie, prière et contemplation, élan missionnaire et enseignement, amour préféren­tiel pour les pauvres… Cette église de Jérusalem porte en germe toutes les richesses que l’Église déve­loppera au cours des siècles : comme une source, elle est l’Église en son premier jaillissement, dans la pure­té éternelle de son mystère, l’intégrité originelle de sa communion, et la vitalité première de sa mission.

-4-

Quant aux chanoines réguliers, ils n’ont pas à proprement parler de fondateur. Ils se sont réclamés de saint Augustin à cause de sa Règle, profondément inspirée par l’exemple de l’Église primitive, et proba­blement composée pour ses frères moines du monas­tère du Jardin[3]. Ils s’y réfèrent plus encore en raison du genre de vie qu’il a institué ensuite dans sa mai­son épiscopale d’Hippone : dans leur communauté fraternelle comme dans leurs activités pastorales, l’évêque Augustin et ses clercs s’engageaient à vivre l’idéal des premiers chrétiens. Aussi les chanoines ré­guliers sont-ils fondés à voir dans cette communauté née à la Pentecôte leur véritable modèle.

-5-

En ce sens, la spiritualité canoniale est une ecclé­siologie vécue[4]-[5], ce qui fait du chanoine régulier, à un titre particulier, un vir ecclesiasticus, homme dans l’Église, mieux, homme de l’Église, homme de la com­munauté chrétienne[6]. Cette caractéristique est vécue de façon communautaire, au sein d’un «collège de prêtres[7]» : le chanoine appartient à un corps orga­nique où se vivent la complémentarité et la co-res­ponsabilité des membres dans l’unité de la tête.

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-6-

La spécificité canoniale n’est pas de privilégier quelque chose dans ou de l’Église, mais de privilégier l’Église en ce qu’elle est et ce qu’elle fait. C’est pour­quoi les communautés de chanoines réguliers ont été très tôt amenées à approfondir leur connaissance du mystère de l’Église, dont elles voulaient être autant que possible signe et réalisation. Telle était et de­meure la constante préoccupation de la congrégation de Saint-Victor née à Paris en 1108, ruinée à la Révo­lution française, mais perpétuée dans sa branche féminine à Ypres en Belgique, et réapparue en France en 1968, d’abord dans une agrégation avec la branche restituée des chanoines de Windesheim.

-7-

Puisque l’Église a donné, dans l’enseignement du Concile Vatican II, une expression particulièrement pleine de la vérité sur elle-même[8], c’est dans cette lumière renouvelée que les chanoines réguliers de Saint-Victor veulent vivre leur idéal, aussi ancien et aussi actuel que l’Église, et capable de répondre aux appels du monde présent.

-8-

L’Église, dans l’actuel approfondissement de son mystère, fait apparaître plus clairement la place de Marie : elle est le point vers lequel tend l’Église[9], dont elle est la réalisation personnelle et parfaite[10]. «Homme de l’Église», le chanoine ne peut qu’être orienté vers Marie.

-9-

À la suite de leurs pères, les chanoines réguliers de Saint-Victor reçoivent Notre-Dame de Bonne Nouvelle comme leur mère et patronne : par sa foi parfaite et sa libre soumission, elle a permis au Salut d’entrer dans le monde; par sa souffrance offerte au pied de la croix, elle a permis au Salut de se donner au monde; par son intercession elle permet à ses en­fants de recevoir la Bonne Nouvelle du Salut et d’en vivre toujours plus profondément pour mieux l’appor­ter au monde.

-10-

Par la vertu de l’Évangile, l’Esprit rajeunit l’Église et la renouvelle sans cesse, l’acheminant à l’union par­faite avec son Époux[11]. Elle en possède ici-bas les ga­ges, et la vie religieuse en est un signe lumineux[12].

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[1] cf. S. Augustin, De sermone Domini in monte in Les Pères dans la foi”, trad. A. Hamman, 1978 [2] cf. Ac 4,31-35 [3] cf. Luc Verheijen, o.s.a., Nouvelle approche de la Règle de S. Augustin T.1, Vie Monastique ed. Bellefontaine 1980 [4] cf. Jean Chatillon, Une ecclésiologie médiévale : l’idée de l’Église dans la théologie de l’école de Saint-Victor in Irenikon 1949, p. 410 [5] cf. Hugues de Saint-Victor, De Archa Noe, PL 176, c. 621 A-B, 625 D, 626 A [6] cf. H. de Lubac, Méditation sur l’Eglise, Paris 1985, p. 209 [7] cf. C.I.C. can. 503 [8] Jean-Paul II, Homélie de la messe d’ouverture du Synode hollandais, 14 jan­vier 1980, D.C. n°1780, 3,4, p. 171 [9] cf. C. Journet, L’Eglise du Verbe Incarné T.2, DDB 1951, p. 393 : La Vierge est dans l’Eglise. Elle est, à l’intérieur de l’Eglise, le lieu dont l’Eglise, en ses autres membres, tend sans cesse à se rapprocher, comme la courbe tend vers son asymptote et le polygone vers le cercle. En la Vierge fleurit, mais d’une manière unique, la grâce christo-transformante (…) Marie est la réalisation la plus pure et la plus intense de l’Eglise. [10] cf. C. Journet, La Vierge Marie et l’Eglise, Paris 1980, p. 24 [11] cf. Lumen Gentium 4 [12] cf. C.I.C. can. 573

I. VIE CANONIALE ET MYSTERE DE L'EGLISE

I. L’ÉGLISE DE LA TRINITÉ, «MYSTÈRE DE COMMUNION MISSIONNAIRE»

-11-

L’Église est, dans son essence la plus profonde, un mystère de foi, intimement lié à l’infini mystère de la Trinité (…) La dimension trinitaire est la dimension première et fondamentale : de son origine à sa conclu­sion historique et à sa destination éternelle, l’Église vit et existe dans la Trinité[1].

-12-

«Mystère dans le Mystère», issue de la fécondité trinitaire et à son image, l’Église est missionnaire : Tout comme il a été envoyé par le Père, le Fils lui-même a envoyé ses apôtres en disant : Allez donc, enseignez toutes les nations, les baptisant au nom du Père et du Fils et du Saint Esprit, leur apprenant à observer tout ce que je vous ai prescrit[2]-[3].

-13-

L’Église est envoyée au monde par Dieu pour lui révéler et lui communiquer son propre mystère d’unité dans la charité : constituée en une commu­nion d’amour, elle est en quelque sorte le sacrement de l’amour trinitaire, signe et moyen de l’union intime avec Dieu et de l’unité du genre humain[4]; elle em­brasse à chaque instant de son existence le dessein salvifique du Père[5], réalisé par le Christ[6] et perpé­tué par l’Esprit Saint[7].

-14-

L’Église est donc un peuple messianique dont tous les membres sont appelés à cette intime com­munion avec Dieu qu’est la sainteté. Adhésion au dessein d’amour du Père qui veut élever tout homme à lui[8], la sainteté fait revivre le mystère du Christ qui donne sa vie pour ses frères[9] : être saint, c’est participer à l’œuvre sacerdotale du Christ, c’est vou­loir et provoquer la sainteté en nos frères.

II. L'EGLISE ET LES VOEUX

-15-

Les chrétiens sont introduits dans cette sainteté par le baptême, qui confère le sacerdoce universel avec le don de l’Esprit. Religieux, ils tendent vers la plénitude d’union à Dieu par le développement orga­nique du baptême que sont les vœux, parfaite ex­pression des conseils évangéliques. Et puisque le Christ Rédempteur achève son œuvre par le don de l’Esprit, la vie religieuse est à la fois «sequela Christi» et «vita Spiritus»[10], à l’image de la première commu­nauté apostolique.

-16-

Les chanoines réguliers sont appelés à entrer pleinement dans le mystère de l’Église : ils vivent leur consécration religieuse dans une communion mis­sionnaire qu’ils exercent par leur vie commune fami­liale et liturgique, et qu’ils diffusent par leurs activités pastorales liées au sacerdoce ministériel. Ils recher­chent ainsi la plénitude d’humanité atteinte dans le Christ[11]; ils désirent participer à l’élan missionnaire que l’Église reçoit à la Pentecôte pour l’évangélisation du monde; ils se réfèrent enfin à la communauté apostolique comme à un modèle, et bien plus comme à une source, à travers son prolongement actuel dans les successeurs de Pierre et des apôtres, la fraction du pain et l’union des cœurs.

a) La chasteté [12]

-17-

La chasteté fut parfaitement pratiquée par le Christ. Elle est l’expression dans ce monde de sa fi­liation éternelle, où son être reçu du Père lui est re­donné dans un acte d’amour réciproque et total qui est l’Esprit Saint lui-même. Il vécut concrètement cette chasteté, brûlant de charité pour chaque per­sonne jusqu’au don de sa propre vie, avec un amour préférentiel pour les plus petits et les plus pauvres.

-18-

Par son alliance sponsale avec l’Église[13], il ac­complit la fidélité de Dieu éprouvée par le peuple élu dans l’ancienne alliance, réalisée dans un dévoue­ment complet au service de Dieu et de ses frères, consommée aux noces de la croix. Cet amour fidèle et chaste, il le communique en plénitude à son Église quand son Esprit de charité, à la Pentecôte, rend les apôtres capables du don total de leur vie.

-19-

Dès lors, il appelle tous les hommes à participer à la chasteté de l’Église lorsqu’il les constitue par le baptême membres de ce peuple habité par l’Esprit Saint : la chasteté chrétienne appartient à la charité vécue jusqu’au bout.

-20-

Dans tout amour humain sauvé par le Christ, la chasteté conduit à la vérité de l’amour; mais le vœu qu’inspire le conseil évangélique donne à la chasteté une forme particulière qui se vit dans la continence parfaite et le célibat perpétuel, et rend le règne de Dieu plus proche de la vie des hommes, ce règne où il n’y aura plus ni l’homme ni la femme[14]. Fruit d’un amour sans partage, elle apprend aux hommes l’amour exclusif du Père, véritable source de tout amour, et réalise déjà dans un cœur dépouillé les avancées du Royaume et la remontée de l’univers au sein de la Trinité.

-21-

La chasteté est soutenue par une charité effec­tive. Il n’y a en effet qu’un amour : lorsqu’il s’exerce avec force vis à vis des frères dans la vie commune, il anime la continence parfaite requise par notre consé­cration; lorsqu’il s’exerce quotidiennement dans le don de soi et le service des autres, il grandit et mûrit pour affronter les combats de la croix.

-22-

Dans nos communautés, cette chasteté requiert la garde du regard, qui suppose entre autres un usage défini et prudent des médias, le don de soi par un service régulier dans les tâches quotidiennes, l’as­cèse du travail accompli jusqu’au bout, le respect de soi et des autres dans toutes les dimensions de la personne.

b) La pauvreté [15]

-23-

Recevant tout son être du Père, le Fils éternel n’a pas reculé devant l’abîme de pauvreté que fut son In­carnation, pour nous enrichir par sa pauvreté[16]. Il vé­cut concrètement cette pauvreté radicale de la crèche à la croix, dans la dépendance à l’égard de Marie et Joseph, la mise en commun avec ses disciples, le dé­nuement de la Passion et l’abaissement final de l’Eu­charistie. Il communique sa pauvreté à son Église quand, à l’Ascension, il quitte les hommes pour leur préparer une place auprès du Père : les apôtres sont alors invités à tendre vers les réalités d’en haut tout en œuvrant ici-bas.

-24-

Dès lors, il appelle tous les hommes à participer à la pauvreté de son Église lorsqu’il les constitue par le baptême membres de son corps, et leur donne l’es­pérance qui les fait tendre vers les biens du ciel et remettre à leur juste place ceux de la terre : la pau­vreté chrétienne est l’exercice de l’espérance théolo­gale.

-25-

À tout chrétien, le Christ donne et ordonne cette pauvreté par les appels au partage qu’entraîne toute misère, par les dépendances et les limites qu’impose la vie, dont le terme oblige à tout laisser. La commu­nauté chrétienne suscite l’active participation maté­rielle de chacun; mais le vœu qu’inspire le conseil évangélique donne à la pauvreté une forme particu­lière qui anticipe le Royaume où Dieu sera notre seul bien, et où disparaîtra toute propriété humaine, si légitime fût-elle.

-26-

Cette pauvreté parfaite permet aux religieux d’exercer leur responsabilité à l’égard du monde en l’enrichissant des biens mêmes de Dieu; ils y réalisent les prémices du Royaume, et anticipent la transfigu­ration finale du cosmos. Selon l’usage de nos pères victorins, pour lesquels le vœu de pauvreté était ex­primé par le mot de «communion», la mise en commun et la désappropriation personnelle sont la forme que prend la pauvreté du chanoine régulier. Ce dé­pouillement constitue la communauté canoniale : qui déroge à cette règle porte atteinte à sa communauté en même temps qu’il manque à son vœu.

-27-

Les chanoines renoncent à leurs biens avant la profession solennelle selon le droit[17]. Autant que la confiance en Dieu, la responsabilité de chacun vis à vis des biens communautaires est essentielle à cette pauvreté-communion; de plus, chacun est responsa­ble de sa pauvreté, car il est distribué à chacun selon ses besoins[18]; enfin, une pauvreté spirituelle et res­ponsable ne se limite pas à la simplicité de vie : elle exige une dépendance réelle par rapport à la commu­nauté, car désormais, le frère vit en elle et par elle.

c) L’obéissance [19]

-28-

Dans le prolongement de sa filiation éternelle, le Christ, soumis à la volonté de son Père dès son entrée dans le monde, s’est fait obéissant jusqu’à la mort. Son obéissance s’est exercée à travers les événements précis de son existence terrestre : sa clairvoyance messianique sur la passion n’enlevait rien à l’exigence de l’obéissance face à la croix.

-29-

Par sa libre obéissance au Père, il rachète la dés­obéissance initiale. Pour que son Église puisse perpé­tuer son œuvre de salut, il lui communique cette même obéissance filiale en la soumettant aux apôtres et à leurs successeurs : dans l’élection de l’apôtre Matthias[20], il confie à des hommes guidés par l’Esprit Saint la charge de désigner ceux que Dieu constitue comme têtes des communautés.

-30-

Dès lors, il appelle tous les hommes à participer à l’obéissance de son Église lorsqu’il les constitue fils de Dieu par le baptême et leur donne la foi. L’obéis­sance chrétienne n’est autre que l’exercice de la foi, adhésion amoureuse à la volonté du Père.

-31-

À tout chrétien, il demande l’obéissance au des­sein du Père qui s’exprime universellement dans le monde, entre autres par l’ordre naturel et les com­mandements; mais le vœu qu’inspire le conseil évan­gélique donne à cette obéissance une forme particu­lière qui fait recevoir les supérieurs de communautés comme des instruments de la volonté du Père[21]. Fruit d’une liberté humaine parfaite, ce vœu permet à l’homme de régner vraiment sur un monde qu’il rapporte au Père par le Christ pour constituer le Royaume.

-32-

Pour souligner le caractère filial de notre obéis­sance et la nature familiale de notre communion, le supérieur majeur est normalement un abbé et en porte le nom, selon l’expression familière qu’emploie le Christ pour s’adresser à son Père.

-33-

Prélude à l’acte d’obéissance, le dialogue ne peut être une tentative d’échapper à la volonté du Père : celui qui obéit doit y voir un moyen d’exercer sa li­berté de façon responsable et mûre; celui qui com­mande y cherche la confirmation que son ordre est l’authentique expression de la volonté divine, qui se révèle aussi bien par des lumières intérieures que par des éléments extérieurs. Le serviteur n’étant pas plus grand que le maître, l’obéissance prend tantôt la forme de l’agonie dans un mystère de croix, tantôt la forme de l’exultation dans un mystère de joie[22].

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[1] Jean Paul II, Audience Générale du 9/l0/1991, D.C. n°2038, p. 978 [2] Mt 28,19-20 [3] cf. Lumen Gentium 17 [4] cf. Lumen Gentium 1 [5] cf. Lumen Gentium 2 [6] cf. Lumen Gentium 3 [7] cf. Lumen Gentium 4 [8] cf. Lumen Gentium 2 [9] cf. Gaudium et Spes 22,5 [10] cf. C.I.C. can. 573 [11] cf. Redemptionis Donum 4 [12] cf. C.I.C. can. 599 [13] cf. C.I.C. can. 607 §1 [14] Ga 3,28 [15] cf. C.I.C. can. 600 [16] 2Cor 8,9 [17] cf. C.I.C. can. 668 [18] cf. Ac 4,35; cf. La Règle de S. Augustin, trad. A.Sage, A.A., La vie augusti­nienne, Paris 1971, I,2, p. 23 [19] cf. C.I.C. can. 601 [20] cf. Ac 1,21-26 [21] cf. C.I.C. can. 601 : Le conseil évangélique d’obéissance, assumé en esprit de foi et d’amour à la suite du Christ obéissant jusqu’à la mort, oblige à la soumis­sion de la volonté aux supérieurs légitimes qui tiennent la place de Dieu, lorsqu’ils commandent suivant leurs propres constitutions. [22] cf. Mt 11; Lc 1,46-55; 10,17; 10,21

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III. NAISSANCE ET CROISSANCE DE LA VIE CANONIALE

-34-

Dieu travaille dans l’histoire : par les alliances successives, il prépare les hommes à devenir ce «peuple des derniers temps» qu’est l’Église. Dans sa propre histoire, celle-ci reçoit de lui la mission et le temps d’atteindre sa stature parfaite en laquelle se réalise la plénitude du Christ[1].

-35-

La vie canoniale naît de l’Église et, comme elle, s’inscrit dans l’histoire pour tendre vers la plénitude voulue par Dieu. Libre réponse à une alliance d’amour, notre vie religieuse devient un reflet person­nel de l’Histoire Sainte, selon l’intuition profonde de nos pères victorins.

-36-

Comme Abraham appelé à tout quitter pour la terre promise[2], Dieu nous invite, sans autre motif que son amour gratuit, personnel et unique, à ne rien préférer au Christ et à lui appartenir[3]. C’est donc comme membres du Christ que sont reçus ceux qui désirent rejoindre notre communauté : ils y reconnaissent le lieu où ils pourront répondre à l’appel de Dieu. Fervente, joyeuse et unanime, la communauté devient ainsi pour eux la «terre promise».

-37-

Dans sa marche vers la consécration, le candi­dat, puis le nouveau religieux, rencontre la présence de Marie comme modèle par sa consécration, mais aussi comme mère, parce que mère de celui qui fut consacré et envoyé[4].

-38-

À toutes les étapes de sa croissance, le religieux est le premier responsable de sa libre adhésion au dessein actuel de Dieu pour lui[5], et en accepte toutes les conséquences, habité par l’Esprit qui fait croî­tre et porter du fruit[6]. Pour correspondre au mieux aux appels de ce Maître intérieur, il est aidé par ses supérieurs[7] et par un guide spirituel choisi selon le droit propre[8].

-39-

Avant et pendant toute formation, l’appel de Dieu à une vie canoniale doit être vérifié : avec les fruits visibles qui authentifient toute vocation, l’un des principaux critères de discernement est l’amour du candidat pour l’Église du Verbe incarné, dont la communauté canoniale est la réalisation locale pour ses membres.

a) La formation

-40-

La formation religieuse tient la première place dans la croissance de la vie canoniale[9]. Son but principal est de guider les religieux dans leur décou­verte progressive et personnelle de Dieu.

-41-

Par l’expérience du désert, par la pédagogie de la loi, par les prophètes et par les psaumes[10], Dieu a progressivement formé son peuple à une qualité d’amour qui trouvera son sens et son accomplisse­ment en Jésus-Christ. Le Fils de Dieu a appris à ses disciples l’amitié avec lui et la compassion vis à vis de chaque homme, la liberté du cœur, l’abandon au Père et le sens de la croix[11]. Mais cette formation est res­tée vaine tant que Pierre et les disciples n’ont pas fait l’expérience de se laisser aimer au-delà de leurs fai­blesses. Aussi la formation doit-elle faire découvrir que Dieu se donne à nous plus que nous à lui, car il est au milieu de nous comme celui qui sert[12].

-42-

Chaque maison autonome est responsable de la formation de ses membres selon le droit universel et le droit propre. Le supérieur majeur, avec le consentement du chapitre plénier, décide de l’ouverture, de la résidence et de la fermeture d’un noviciat comme d’une maison de formation, et en informe l’abbé général.

* Le postulat
-43-

Nul ne peut être admis sans une préparation convenable[13]. Le supérieur majeur, après consulta­tion de son conseil, décide de l’admission au postulat. Pour cette décision comme pour la formation, il tient compte de la culture des candidats et de leur besoin d’atteindre une maturité et un équilibre affectif suffisants[14]. Dans l’accueil qu’ils reçoivent, l’accompa­gnement spirituel est prioritaire.

* Le noviciat
-44-

Il n’y a qu’un noviciat par maison autonome, commun à tous, futurs prêtres ou non. Le supérieur majeur reçoit le candidat au noviciat après consulta­tion de son conseil, et fixe le jour où commence ce noviciat. Pour sa validité, sa durée n’est pas infé­rieure à douze mois[15]; elle ne dépasse pas vingt-qua­tre mois, décompte fait des absences admises par le droit. Sa durée exacte est fixée dans chaque maison autonome par le droit propre. Au terme de cette du­rée, le supérieur peut prolonger le temps de noviciat, mais pas au-delà de six mois[16].

-45-

Le noviciat commence normalement par la prise d’habit. En signe de leur consécration et pour la fa­voriser, les chanoines portent l’habit religieux selon le droit propre[17]. Ils portent toujours l’habit de chœur dans les offices célébrés solennellement. Instrument de la charité, l’habit ne doit jamais devenir occasion de discorde.

-46-

Aucune formation autre que la formation reli­gieuse n’est poursuivie ou entreprise durant les douze premiers mois du noviciat. Cette formation re­ligieuse est confiée au père-maître, prêtre et profès solennel, choisi par le supérieur majeur avec le consentement de son conseil, selon le droit universel[18] et le droit propre.

-47-

Le discernement sur la forme de l’appel com­mence avec le noviciat. Notre consécration canoniale s’enracine d’abord dans le baptême et son sacerdoce universel, qu’elle veut mener à sa perfection. C’est pourquoi, bien qu’appartenant à un ordre clérical, tous ceux qui sont authentiquement appelés ne re­çoivent pas nécessairement les ordres sacrés. Mais pour la plupart des membres, la consécration s’enra­cine aussi dans le sacrement de l’ordre.

-48-

Avant l’engagement définitif, ce discernement est ratifié par écrit par le supérieur majeur et le religieux, si ce dernier n’est pas appelé aux ordres sacrés. Le supérieur majeur reste toujours libre de ne pas appeler à ces ordres pour une raison grave, après consul­tation de son conseil.

b) L’engagement

* La profession religieuse
-49-

Le supérieur majeur, avec le consentement du chapitre plénier, accepte le candidat à la profession religieuse temporaire au terme du noviciat accompli suivant le droit. Le religieux se lie pour trois ans, mais dans un esprit de consécration définitive. Il revient au supérieur majeur, ou à son délégué, de recevoir ces vœux.

-50-

Au terme de ces trois ans, après consultation de son conseil, le supérieur majeur peut permettre le re­nouvellement, année après année, des vœux tempo­raires en vue de la profession solennelle. La durée des vœux temporaires ne peut excéder six ans[19].

-51-

La formule de profession temporaire est la sui­vante : Au nom du Père et du Fils et du Saint Esprit Moi, N., désirant tendre de toutes mes forces à la communion parfaite avec Dieu et avec mes frères, sou­tenu par la grâce, je fais vœu pour trois ans de chaste­té, de pauvreté et d’obéissance, selon la Règle de saint Augustin et les constitutions de notre congrégation des Chanoines réguliers de Saint-Victor. Je le promets à Dieu et à son Église, devant mes frères et devant vous, Révérendissime Père N., abbé de ce monastère N.. Que Notre-Dame, saint Augustin, saint Victor et tous les saints me soient en aide. Amen. Fait à N., le….

-52-

Le responsable de la formation, un prêtre si possible différent du père-maître, est désigné par le supérieur majeur avec le consentement de son conseil. Pour tous les profès et oblats, il organise et accompagne les études en fonction du programme établi selon le droit universel et le droit propre. Il est aussi chargé d’aider les profès et oblats temporaires à développer les divers aspects spirituels, intellectuels, communautaires et pastoraux de leur vocation.

-53-

Les confrères destinés aux ordres sacrés suivent la formation requise par le droit universel et le droit propre. Durant les vœux temporaires, tous suivent la formation religieuse selon le droit universel et le droit propre[20]. À la demande du supérieur majeur, ils peu­vent entreprendre ou poursuivre une formation pro­fessionnelle, en lien avec la vie de la communauté.

-54-

Au terme des vœux temporaires, le supérieur majeur, avec le consentement du chapitre plénier, accepte le candidat à la profession solennelle.

-55-

La formule de profession solennelle est la sui­vante : Au nom du Père et du Fils et du Saint Esprit Moi, N., désirant tendre de toutes mes forces à la communion parfaite avec Dieu et avec mes frères, sou­tenu par la grâce, je m’attache à ce chapitre de N. et je fais solennellement vœu de chasteté, de pauvreté et d’obéissance, selon la Règle de saint Augustin et les constitutions de notre congrégation des Chanoines ré­guliers de Saint-Victor. Je le promets à Dieu et à son Église, devant mes frères et devant vous, Révérendis­sime Père N., abbé de ce monastère N.. Que Notre-Dame, saint Augustin, saint Victor et tous les saints me soient en aide. Amen. Fait à N., le…

* L’oblature
-56-

L’oblature manifeste la richesse de l’Église, les manières différentes qu’a le Seigneur d’attirer et l’homme de consentir par l’offrande de lui-même. C’est une autre forme d’engagement : le confrère appelé à partager notre vie peut se lier par des liens sacrés assimilés aux vœux[21], que nous appelons promesses[22]. Par elles, le religieux s’oblige lui aussi à la pratique des trois conseils évangéliques, restant sauves les dispositions suivantes :

-57-

Le confrère oblat perpétuel garde le droit et le pouvoir de posséder. Cependant, tout ce qui lui échoit revient de droit à la communauté, sauf dispositions contraires déterminées par le droit propre[23]. L’usage de ses biens personnels reste soumis à l’observance commune des vœux de pauvreté et d’obéissance.

-58-

Le confrère oblat est membre de la communauté, même s’il n’est pas membre du chapitre plénier. Par ses promesses perpétuelles, il est incardiné à la communauté s’il est clerc. Il peut être nommé à certaines charges selon le droit propre.

-59-

Il suit les étapes de la formation jusqu’à l’enga­gement perpétuel comme un profès, mais prononce les promesses selon le droit propre. Compte tenu de la nécessité de connaître notre genre de vie, cette formation et un séjour de longue durée dans l’une de nos maisons sont indispensables[24]; cependant, le su­périeur majeur, avec le consentement du chapitre plénier, peut dispenser d’une partie de cette forma­tion selon le droit propre. -60- Après discernement, le supérieur majeur, avec le consentement du chapitre plénier, peut accepter qu’un religieux transforme ses promesses en vœux, qu’il ne prononce qu’après renonciation à ses biens selon le droit.

c) L’accomplissement

-61-

L’épanouissement de notre alliance d’amour avec le Christ ne s’achève pas dans l’engagement définitif; le confrère ne cesse d’apprendre à discerner les signes de l’Esprit pour leur donner une réponse appropriée. Il le fait par une formation permanente, des exercices spirituels réguliers, personnels et communautaires, une mise à jour doctrinale, pastorale ou profession­nelle, un approfondissement de notre charisme pro­pre et une connaissance actuelle du monde où il s’exerce[25]. Chaque année, le supérieur donne des temps convenables pour la restauration de l’âme et du corps.

-62-

Après dix ans d’engagement définitif, chaque confrère reçoit du supérieur le temps d’effectuer un «second noviciat» précisé par le droit propre, pour qu’il puisse prendre réellement ses distances par rapport à la vie ordinaire et à ses habitudes[26], et progresser ainsi dans sa vocation.

-63-

Enfin, l’abbé et la communauté ont une sollici­tude particulière à l’égard du confrère qui approche de la rencontre définitive avec Dieu : il doit pouvoir vivre cette période en se laissant pénétrer par l’expé­rience pascale, en grandissant dans le désir d’être avec le Christ jusque dans la gloire à laquelle lui fai­sait déjà tendre sa première réponse à l’appel de Dieu[27].

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[1] Eph 4,11-l3; Col 1,24 [2] cf. Hx 11,1… [3] cf. 1Cor 6,l9; cf. Hugues de Saint-Victor, Exi de terra tua et de cognatione tua, Sermo ad Fratres, PL 177, c. 521A-523B [4] cf. EE 2,53, cité dans Directives de Formation dans les Instituts Religieux 20 [5] cf. Directives de Formation dans les Instituts Religieux 29 [6] cf. Pastores dabo vobis n°69, p. 185 : le candidat est le protagoniste (…) de sa formation. [7] cf. C.I.C. can. 630 [8] cf. C.I.C. can. 239 §1-2 [9] cf. La dimension contemplative de la vie religieuse 17 [10] cf. Lc 24,27; cf. Directives de Formation dans les Instituts Religieux 29 [11] cf. C.M. Martini, L’évangélisateur en saint Luc Médiaspaul 1985, pp. 91-134 [12] cf. Lc 22, et 2Cor 12,9 [13] cf. C.I.C. can. 597 §2 [14] cf. Directives de Formation dans les Instituts Religieux 44 [15] cf. C.I.C. can. 648-649 [16] cf. C.I.C. can. 653 [17] cf. C.I.C. can. 669 [18] cf. C.I.C. can. 650-652 [19] cf. C.I.C. can. 655 [20] cf. C.I.C. can. 659-660 [21] cf. Lumen Gentium 43, et Perfectae Caritatis 1 [22] cf. Lumen Gentium 44 et C.I.C. can. 573 §2 [23] cf. C.I.C. can. 668 §3 [24] cf. C.I.C. can. 659 §1 [25] cf. C.I.C. can. 661 [26] cf. Directives de Formation dans les Instituts Religieux 70 [27] cf. Ph 3,10; Jn 21,l5; 2Cor 4,10

IV. LES SOURCES VITALES DE LA VIE CANONIALE

-64-

C’est dans l’exercice sanctifiant de son sacer­doce, commun ou ministériel, que le chanoine puise sa vie aux mêmes sources que l’Église. Par l’Esprit Saint, il devient cet homme nouveau en qui sont unis le don de Dieu à soi et le don de soi aux autres : il est configuré au Christ, prophète, prêtre et roi[1].

-65-

En participant à la fonction prophétique, il écoute avec confiance et proclame avec assurance la parole de Dieu[2]. En participant à la fonction sacer­dotale, il célèbre la liturgie, qui est le sommet auquel tend l’action de l’Église, et en même temps la source d’où découle toute sa vertu[3]. En participant à la fonction royale, il met à la disposition du genre humain la puissance salvatrice que l’Église reçoit de son fondateur[4] : à la suite du Christ, il trouve sa joie dans le service de ses frères, en leur révélant leur propre dignité et en travaillant à leur fraternité. Ainsi, la première communauté chrétienne était-elle fidèle à la communion fraternelle[5].

a) La Parole de Dieu

-66-

La parole de Dieu est source vitale de commu­nion : les premiers disciples se montraient assidus à l’enseignement des apôtres[6]. Elle donne à l’Église son point d’appui et sa vigueur; chaque confrère y trouve la force de sa foi et la nourriture de sa vie spi­rituelle[7]. Dans la révélation, le Dieu invisible s’adresse aux hommes comme à ses amis; il s’entre­tient avec eux pour les inviter à partager sa propre vie[8] et leur donne part aux biens divins[9].

-67-

L’Église reçoit cette parole en un unique dépôt constitué par la Tradition et l’Écriture. En s’y atta­chant, le confrère est à son tour fidèle à l’enseigne­ment des apôtres[10]. Pour lui, le magistère vivant de l’Église est le serviteur de cette parole, auquel a été donné le pouvoir d’interprétation authentique[11].

-68-

À travers l’Écriture donnée dans la Tradition, Dieu se communique à nous progressivement, jus­qu’au moment du face à face. Ainsi, l’étude de la parole de Dieu sous toutes ses formes est-elle davan­tage une quête de la sagesse divine qu’un savoir acquis une fois pour toutes.

-69-

Comme les premiers victorins, le confrère reste uni au mystère de la parole et s’astreint fidèlement à son étude[12]. Il en fait le fondement de son activité pastorale[13], qui a pour but d’actualiser la vérité intemporelle du salut[14].

b) La Liturgie

-70-

C’est de la liturgie, et principalement de l’eucha­ristie, comme d’une source, que la grâce découle en nous et qu’on obtient avec le maximum d’efficacité cette sanctification des hommes dans le Christ et cette glorification de Dieu que recherchent comme leur fin toutes les autres œuvres de l’Église[15].

* L’eucharistie
-71-

Lié au mystère de l’Église, le chanoine est spécia­lement ordonné à l’eucharistie[16], ce banquet pascal dans lequel le Christ est mangé, l’âme comblée de grâce, et le gage de la gloire future nous est donné[17].

-72-

L’eucharistie est source et sommet de la com­munion : les premiers disciples se montraient fidèles à la fraction du pain[18]. Pour saint Augustin, le pain, c’est le corps du Christ dont parle l’apôtre quand il s’adresse à l’Église : vous êtes le corps du Christ et ses membres. Ce que vous recevez, vous l’êtes par la grâce du Christ. Vous y souscrivez quand vous dites : amen. Ce que vous voyez, c’est le sacrement de l’unité[19].

-73-

En faisant profession à l’autel, le confrère mani­feste l’union de son offrande à Dieu et du sacrifice eucharistique; il vit intensément de ce sacrement où il puise le renouvellement du don de lui-même[20].

-74-

L’eucharistie communautaire quotidienne, qui fonde notre unité familiale et sacerdotale, rassemble tous les confrères; ils s’unissent à sa double dimen­sion de sacrifice et de sacrement. Les prêtres célè­brent ou concélèbrent chaque jour l’eucharistie. Centre de la communauté, elle est régulièrement vénérée par tous et proposée à l’adoration[21].

* L’office divin
-75-

Le Christ associe toujours l’Église, son épouse bien-aimée, à son œuvre de salut des hommes, mais aussi à sa louange de gloire du Père[22]. Par lui, l’Église rend un culte au Père éternel. En effet, le Christ a in­troduit dans notre exil terrestre cet hymne qui se chante éternellement dans les demeures célestes[23] et auquel participaient les premiers chrétiens, qui étaient fidèles aux prières[24].

-76-

Cet admirable cantique de louange, célébré selon les règles, est vraiment la voix de l’épouse qui s’adresse à son Époux; mieux encore, c’est la prière que le Christ présente au Père avec son corps[25]. En assurant l’office de l’Église, les chanoines se tiennent devant le trône de Dieu au nom de la Mère Église[26].

-77-

L’office[27], en particulier laudes et vêpres, est chanté autant que possible dans toutes nos mai­sons[28] : Chanter est le propre de ceux qui aiment[29]. La charité fraternelle unit la prière intérieure et le culte extérieur, qui constituent toute la liturgie, sans que l’une ou l’autre en ait à souffrir[30].

c) La prière personnelle

-78-

Si le confrère est appelé à prier en commun, il doit aussi entrer dans sa chambre pour prier le Père dans le secret[31]; l’apôtre enseigne même qu’il doit prier sans relâche[32].

-79-

Dieu se manifeste dans l’esprit et le cœur de chacun. Dans la prière, l’Esprit Saint nous fait goûter cette connaissance intime et vraie du Seigneur sans laquelle nous ne pourrions ni comprendre la valeur de la vie chrétienne et religieuse, ni posséder la force de progresser dans la joie d’une espérance qui ne trompe pas[33]. Dans chaque maison, selon le droit propre, les supérieurs fixent des temps d’oraison silencieuse devant le saint sacrement[34].

-80-

Cette recherche de l’intimité avec Dieu requiert des temps et des lieux de solitude réelle et de silence matériel[35], des récollections et retraites périodi­ques[36]. Une pédagogie de la solitude est mise en œuvre au cours de la formation : le confrère s’exerce au silence dès qu’il le peut afin de savoir parler quand il le faut. Il apprend que le vrai silence ne blesse jamais la charité, et que la vraie charité anime le silence[37].

d) La pénitence

-81-

L’Église, qui enferme des pécheurs dans son pro­pre sein, est donc à la fois sainte et appelée à se puri­fier, et poursuit constamment son effort de pénitence et de renouvellement[38]. Ainsi les premiers disciples entendirent-ils l’appel des apôtres : repentez-vous[39].

-82-

Pour tous les confrères, cette pénitence[40] s’ex­prime dans un authentique regret des fautes et une quête du pardon de Dieu, en particulier en s’appro­chant fréquemment du sacrement de la réconcilia­tion[41]. Elle se vit aussi par les jeûnes[42] prévus selon le droit. Elle s’exerce enfin dans la mortifica­tion[43], pour que la vie de Jésus se manifeste dans no­tre chair mortelle[44]. À l’image de celle du Christ, cette mort à soi-même est non seulement pleine d’amour, mais vient de l’amour. La principale ascèse du confrère est la fidélité à ses vœux, à la vie commune et aux tâches apostoliques; elle consiste à éliminer ce qui s’y oppose, comme le murmure dans l’obéissance, l’esprit de propriété dans la pauvreté, ou le manque de disponibilité dans la chasteté.

_________________________

[1] cf. C.I.C. can. 204; cf. Presbyterorum Ordinis 13 [2] cf. Dei Verbum 1 [3] cf. Sacrosanctum Concilium 10&7 [4] cf. Gaudium et spes 3 [5] cf. Ac 2,42 [6] cf. Ac 2,42 [7] cf. Dei Verbum 21 [8] cf. Dei Verbum 2 [9] cf. Dei Verbum 6; cf. Hugues de Saint-Victor, De Archa Noe, PL 176, c. 668C-670A [10] cf. Dei Verbum 10 [11] cf. Dei Verbum 10 [12] cf. C.I.C. can. 663 §3 [13] cf. Presbyterorum Ordinis 8 : …ceux qui assurent un ministère paroissial ou supra-paroissial, comme ceux qui se consacrent à un travail scientifique de re­cherche ou d’enseignement. [14] cf. Synode romain de 1985, Rapport final, B.a-1 [15] cf. Sacrosanctum Concilium 10 [16] cf. S. Thomas d’Aquin, Summa Theologiae, IIa-IIae, Q. 189, a. 8 [17] cf. Sacrosanctum Concilium 47 [18] cf. Ac 2,42 [19] Sermo 272 [20] cf. Evangelica testificatio 47 [21] cf. C.I.C. can. 663 §2 [22] Ep 1,l2 [23] cf. Sacrosanctum Concilium 83 [24] cf. Ac 2,42 [25] cf. Sacrosanctum Concilium 84 [26] cf. Sacrosanctum Concilium 85 [27] cf. C.I.C. can. 1173 [28] cf. Institutio Generalis de Liturgia Horarum n°24&28 [29] S. Augustin, Sermo 336, PL. 38, c. 1472 [30] cf. Evangelica testificatio 47 [31] Mt 6,6 [32] 1Th 5,l7, et Sacrosanctum Concilium 12 [33] cf. Evangelica testificatio 43 [34] cf. C.I.C. can. 663 §3. Sur la différence entre méditation et oraison, cf. Caté­chisme de l’Église Catholique, MAME/PLON 1992, n° 2705 à 2719 [35] cf. La prière dans la vie religieuse, discours de Jean-Paul II aux membres de la Congrégation pour les Religieux et les Instituts Séculiers, 7/3/1980, D.C. n°1783, p. 313, La valeur de la vie contemplative §2,3 [36] cf. C.I.C. can. 663 [37] cf. Hugues de Saint-Victor, De Institutione Novitiorum, PL 176, c. 943d-949A [38] cf. Lumen Gentium 8 [39] cf. Act 2,38 [40] cf. C.I.C. can. 673 [41] cf. C.I.C. can. 664 [42] cf. C.I.C. can. 1249-1253 [43] cf. Gal 5,22 [44] 2Cor 4,10; cf.Sacrosanctum Concilium 12

II. LA COMMUNION CANONIALE

-83-

L’ecclésiologie de communion est le concept cen­tral et fondamental dans les documents du Concile[1]. La koinonia-communion, fondée sur la Sainte Écriture, fut tenue en grand honneur dans l’Église antique (…) L’ecclésiologie de communion ne peut pas se réduire à de pures questions d’organisation ou à des problèmes qui ne concerneraient que de simples pouvoirs. L’ecclésiologie de communion est aussi fondement de l’ordre dans l’Église, et surtout d’une correcte relation entre unité et pluriformité dans l’Église[2].

-84-

C’est dans cette compréhension renouvelée de la communion que veulent vivre les chanoines réguliers de Saint-Victor, pour suivre d’une manière actuelle l’exemple de la première communauté chrétienne de Jérusalem, du monastère des clercs d’Hippone, et de leurs pères victorins.

-85-

Fidèles à saint Augustin, les chanoines se pro­posent de constituer cette communion dans l’esprit qui se dégage du début de la Règle, sans oublier que la communion des confrères entre eux, même dans ses aspects les plus élevés, est au service de la com­munion de chaque confrère avec la «Beauté spiri­tuelle»[3].

I. LA VIE COMMUNE

-86-

Il s’est donc engagé à la sainteté, il s’est engagé à vivre en communauté, il a professé qu’il est bon et qu’il est doux pour des frères de vivre ensemble[4]-[5] : c’est la douceur de la charité qui fait habiter des frères au monastère.

1. Les confrères

-87-

Les chanoines réguliers sont d’abord des bapti­sés : c’est pourquoi, quels que soient leurs respon­sabilités, leur ancienneté ou leur engagement dans la communauté, tous possèdent la même dignité des enfants de Dieu[6].

-88-

Tous ont aussi comme but commun la charité, sachant que le Christ a fait un seul et même com­mandement de l’amour de Dieu et de l’amour du pro­chain. Que personne ne dise : je ne sais quoi aimer. Qu’il aime son frère, il aimera ce même amour. Il con­naît mieux en effet l’amour dont il aime que son frère qu’il aime. Et voilà dès lors que Dieu lui est mieux connu que son frère : beaucoup mieux connu parce que plus présent; mieux connu parce que plus intérieur; mieux connu parce que plus certain. Embrasse le Dieu amour, et tu embrasseras Dieu par amour (…) Cette charité fraternelle qui nous fait nous aimer les uns les autres, non seulement vient de Dieu, mais elle est Dieu. Par conséquent, en aimant notre frère selon l’amour, nous aimons notre frère selon Dieu[7].

-89-

Tous, enfin, tendent vers la perfection de la cha­rité en s’engageant au service de Dieu, de leurs frères et de toute l’Église par des liens sacrés, selon des de­grés d’appartenance qui manifestent leur complémen­tarité, dans un profond respect réciproque, et avec le même sens de la responsabilité personnelle à l’égard du bien de tous.

-90-

C’est ainsi que la plupart des frères sont appelés à la plénitude de la vie canoniale par leurs vœux so­lennels, tandis que d’autres, les oblats, partagent cette vie selon un mode différent, mais tout aussi réel quant à la charité fraternelle et à la fécondité aposto­lique.

-91-

Suivant l’exemple d’Hippone, la maison cano­niale est constituée surtout de clercs. La plupart des confrères sont ou seront prêtres ou diacres, appelés par Dieu au service du sacerdoce commun des bapti­sés : Le clerc a fait profession de deux choses : la sain­teté et la cléricature. Intérieurement, la sainteté. Dieu a posé sur sa tête la cléricature, pour son peuple. C’est plus une charge qu’un honneur, mais ‘qui est assez sage pour comprendre cela'[8] ?[9].

-92-

Ceux qui, selon le jugement de l’Église, ne sont pas appelés aux ordres sacrés, vivent la beauté et la grandeur de leur vocation à la sainteté dans la vie commune. Tel est le principal témoignage rendu par la vie canoniale à l’universelle charité de Dieu : Il est de foi qu’il ne peut y avoir de degré plus certain, pour s’élever à l’amour de Dieu, que la charité de l’homme à l’égard de l’homme (…) En effet, quoi de plus proche pour l’homme que l’homme ?[10].

-93-

Dans la communauté canoniale, les confrères malades sont l’objet d’une attention spéciale, selon la parole du Christ : J’étais malade, et vous m’avez vi­sité, et les préceptes de la Règle de saint Augustin[11].

-94-

Enfin, notre communion fraternelle ne s’arrête pas avec la mort, et les suffrages pour les défunts le manifestent : membres d’une unique Église terrestre et céleste, les confrères, vivants ou défunts, restent unis dans la prière réciproque et l’intercession pour le salut du monde.

2. La vie fraternelle

-95-

Les chanoines partagent entre eux et avec tous la charité qu’ils reçoivent de Dieu; elle s’exerce par l’amitié qui les unit et le pardon qu’ils échangent; elle se diffuse par les liens qu’ils entretiennent avec leurs familles, leurs amis, leurs hôtes, les fidèles qui leur sont confiés et tous ceux qu’ils rencontrent; elle se vit en particulier avec les familiers, prêtres ou laïcs : dans la Fraternité de chaque maison autonome, ceux-ci participent, selon leurs possibilités, à la communion canoniale et à son rayonnement.

-96-

La charité embrasse tous les aspects de la vie chrétienne, et à plus forte raison la communion fra­ternelle canoniale[12] : La charité est gardée principa­lement. À la charité se conforme la nourriture, à la charité le langage, à la charité la tenue, à la charité le visage. On s’unit et on se tient en une seule charité. On considère qu’offenser la charité est comme offenser Dieu. Si une chose s’oppose à la charité, on la repousse et on la rejette. Si quoi que ce soit la blesse, on ne laisse pas durer ce mal un seul jour. Ils savent qu’elle a été tellement recommandée par le Christ et les apô­tres, que si elle seule manque, tout est vide; si elle est là, tout est plein[13].

-97-

À l’image du Corps du Christ et en lui, la famille canoniale s’organise pour que la charité grandisse entre ses membres et se diffuse à tous les hommes : ses structures juridiques et pratiques expriment et servent sa nature de communauté surnaturelle qui s’incarne dans le monde.

II. ORGANISATION DE LA CONGREGATION

1. Dispositions générales 

-98-

La congrégation de Saint-Victor est un institut religieux[14] clérical[15] de droit pontifical[16], exempt[17], qui fait partie de l’Ordre canonial et de la Confédération des Chanoines réguliers de Saint-Augustin. Elle tient son existence de ses maisons auto­nomes et les unit entre elles. La congrégation, ses maisons autonomes et leurs prieurés, sont constitués en personnes juridiques de plein droit[18].

-99-

Pour les actes collégiaux, et sauf disposition contraire, a force de droit ce qui, la majorité des person­nes qui doivent être convoquées étant présente (quorum), a recueilli les suffrages de la majorité abso­lue des présents, retranchés les suffrages nuls, mais non les bulletins blancs. Pour les élections, après deux scrutins sans effet, le vote porte sur les deux candidats qui ont obtenu le plus de voix. En cas d’égalité, est choisi le plus âgé par la profession, puis par l’âge[19]. D’autre part, selon nos traditions, tout supérieur majeur vote avec son conseil ou avec son chapitre, sauf en cas de consultation.

-100-

Quand la majorité des deux tiers est requise, il s’agit des deux tiers des membres présents, le quo­rum étant atteint. Le bulletin invalide ou l’abstention ont alors le même effet que le bulletin blanc : ils ne modifient pas le calcul de la majorité.

-101-

Lorsqu’il s’agit d’élire en même temps plus de trois personnes, on procède par suffrages simulta­nés : à chaque tour de scrutin, l’électeur n’inscrit pas plus de noms sur le bulletin qu’il n’y a de personnes à élire[20].

2. La maison autonome

-102-

La maison autonome est le fondement de notre famille canoniale : tous ses membres sont rattachés par leur engagement à une maison autonome parti­culière.

-103-

Chaque maison autonome jouit de la liberté que lui reconnaît l’Église, et que précisent les présen­tes constitutions, quant à ses manières de vivre, son organisation, le choix des supérieurs et officiers conventuels, l’admission et la formation de nouveaux membres, et l’administration des biens temporels[21].

-104-

La maison autonome peut être constituée d’une maison-mère et de prieurés. Comportant au moins dix membres résidents, la maison-mère est établie là où le décide le chapitre plénier. Quant aux prieurés, leur nombre est limité par le coutumier général.

-105-

Une maison autonome est érigée par l’abbé d’une maison autonome avec le consentement de son chapitre plénier, l’accord de l’abbé général et du chapitre général[22].

-106-

Elle est constituée d’au moins douze confrères profès solennels. Une diminution d’effectifs en deçà de ce nombre pendant dix ans entraîne la procédure de suppression d’autonomie.

-107-

L’autonomie d’une maison est supprimée par l’abbé général avec le consentement du chapitre géné­ral, après consultation des confrères de la maison. La perte d’autonomie entraîne la démission du supérieur majeur, et une nouvelle détermination des membres. La responsabilité des biens temporels revient alors au chapitre général suivant le droit[23].

-108-

Une maison autonome est normalement gou­vernée par un abbé. Dans certains cas exceptionnels, en particulier lors de son érection, et pour une durée limitée par le droit propre, la charge peut être assurée par un prieur administrateur, supérieur majeur[24] élu par son chapitre plénier à la majorité absolue et confirmé par l’abbé général.

a) L’abbé
-109-

Celui qui est à la tête du peuple doit comprendre d’abord qu’il est le serviteur de tous (…) Ce que je suis pour vous me fait peur; mais ce que je suis avec vous me rassure : car pour vous, je suis évêque; mais avec vous, je suis chrétien. Le premier titre est celui d’une charge, le second, d’une grâce. Celui-là désigne le péril, celui-ci, le salut[25].

-110-

L’abbé est père et chef de la maison autonome : quoiqu’élu par le chapitre plénier, il tient son autorité de Dieu lui-même par le ministère de l’Église[26]. À la suite du Seigneur, il est le pasteur qui donne sa vie pour ses frères[27]. Dans un esprit de service, il ac­complit sa charge et exerce ses pouvoirs[28], remplis­sant sa mission d’enseigner, de sanctifier et de gou­verner, pour conduire la communauté à la perfection de la charité.

-111-

Comme abbé, il gouverne la maison autonome au spirituel et au temporel selon le droit[29]. Principal artisan de l’unité de la maison, il veille au maintien des liens fraternels entre tous les confrères, qu’ils vi­vent à la maison-mère, dans un prieuré ou ailleurs. Aimant et observant lui-même fidèlement l’esprit de l’Évangile, la Règle, les constitutions et les coutu­miers, il met tout en œuvre pour les faire aimer et ob­server par ceux dont il a reçu la charge, tant par le dialogue fraternel qu’il favorise chez tous, que par la correction des abus dont il a connaissance[30].

-112-

Gardien de la vie canoniale, il veille à promou­voir, par son exemple, son enseignement et ses actes, les exigences de la vie religieuse et celles des ministè­res pastoraux, qui trouvent leur élan dans la com­munion fraternelle.

-113-

Il réside à la maison-mère de la maison autonome[31]. Il préside le chapitre plénier et le conseil, qui l’assistent dans sa charge de gouvernement. Il nomme les officiers conventuels qui lui rendent compte de leur office, et auxquels il délègue son autorité dans les limites de la mission qu’il leur con­fie[32]. Enfin, par souci d’information et de coopéra­tion, il réunit périodiquement les prieurs de la maison autonome.

-114-

En tant que père, lui-même, ou son délégué, préside régulièrement la réunion conventuelle, consti­tuée de tous les frères – profès, oblats et novices – présents dans la maison, pour promouvoir par l’enseignement, l’information et le dialogue une plus grande communion fraternelle, une meilleure réparti­tion des tâches familiales et une vraie fidélité aux exi­gences de la vie canoniale victorine[33].

-115-

L’abbé est un prêtre d’au moins trente-cinq ans, profès solennel de la congrégation depuis au moins cinq ans[34]. Il est élu par le chapitre plénier, à la majorité des deux tiers, pour une durée indéterminée[35]. Son élection est présidée et confirmée par l’abbé général[36]. Après un cinquième tour sans effet, le chapitre plénier élit un prieur administrateur.

-116-

Quand la congrégation n’est constituée que d’une seule maison autonome, l’élection de son supérieur majeur est confirmée par le Saint-Siège[37].

-117-

Pour cause très grave, sur proposition de deux visiteurs et avec l’approbation de l’abbé général et du conseil général, l’abbé d’une maison autonome peut être déposé par son chapitre plénier[38], à la majorité des deux tiers. S’il est abbé général, sa déposition est approuvée par le premier conseiller et le conseil général. En ce cas, il doit aussi présenter au Saint-Siège sa démission de sa charge de modérateur suprême.

-118-

Lorsque l’abbé désire ou doit renoncer à son office pour cause de maladie, d’âge ou pour toute au­tre raison, il présente sa démission à l’abbé général, ou au premier conseiller s’il est aussi abbé général. Sa démission n’est acceptée qu’avec le consentement du conseil général, après consultation du chapitre plénier. Lorsqu’il atteint l’âge de soixante-quinze ans, l’abbé présente sa démission; si elle est refusée, il la présente tous les trois ans[39].

b) Le chapitre plénier
-119-

Le chapitre plénier est un élément fondamental de la maison autonome puisque la communauté canoniale consiste essentiellement en un collège de prê­tres[40] placé sous l’autorité de son supérieur. Chaque membre de droit y est co-responsable du bien commun; sa présence et sa participation active aux consultations et décisions communes sont donc à la fois un droit et un devoir : il ne peut en être relevé ou excusé que par l’abbé avec le consentement de son conseil, selon le droit propre[41].

-120-

Le chapitre plénier est composé de tous les profès solennels de la maison autonome, quelle que soit leur résidence. Il est présidé par l’abbé de la maison ou son délégué. Le président le réunit[42] au moins une fois par an et envoie convocation à tous les membres de droit, au moins un mois à l’avance sauf raisons graves, comportant l’ordre du jour et la documentation utile. Le président peut convoquer les oblats de la communauté, et même des experts, qui peuvent être entendus, mais ne participent pas aux votes[43].

-121-

L’ordre du jour est établi par l’abbé après consultation de son conseil, auquel toutes les propositions des membres de droit doivent être présentées avant la tenue de ce chapitre. Selon le droit propre, le chapitre plénier élit son secrétaire, et le président nomme les deux scrutateurs[44].

-122-

Le consentement du chapitre plénier, en plus des exigences du droit universel et des mentions faites par ailleurs, est requis selon le droit propre pour : admettre un membre à l’oblature temporaire ou définitive; réintégrer un membre, à la majorité des deux tiers; admettre un membre venant d’une autre maison de la congrégation; approuver les comptes de l’année écoulée présentés par l’économe; accepter la présence d’un hôte de longue durée.

c) Le conseil de l'abbé [45]
-123-

Emanant à la fois de l’autorité personnelle de l’abbé et de l’autorité collégiale du chapitre, le conseil est un organe important du gouvernement : il renforce la communion des membres du collège canonial, facilite l’exercice du gouvernement en lui appor­tant lumière et soutien, et aide à prévenir les abus ou à les guérir plus aisément.

-124-

L’abbé fait appel à son conseil dans tous les cas prévus par le droit universel et le droit propre, ou quand il le désire, au moins une fois par trimestre. Il lui revient de convoquer le conseil et d’établir l’ordre du jour, en tenant compte des propositions des conseillers. Si deux d’entre eux demandent la réunion du conseil, l’abbé est tenu de le convoquer. En cas de nécessité, l’abbé peut demander l’avis de son conseil par écrit, ou même par téléphone, sauf opposition d’un conseiller.

-125-

Le conseil est composé du prieur conventuel et du sous-prieur de la maison-mère, et d’au moins deux autres conseillers, prêtres et profès solennels de la maison autonome, élus par le chapitre plénier pour trois ans renouvelables.

-126-

Le consentement du conseil, en plus des exi­gences du droit universel et des mentions faites par ailleurs, est requis selon le droit propre pour : admettre un membre aux ordres sacrés; accepter le passage d’un membre vers une au­tre maison autonome; entamer les procédures de suspension des droits capitulaires, d’exclaustration, de renvoi ou de réintégration d’un membre[46]; accepter la charge de nouvelles paroisses ou d’importants ministères; admettre un familier dans la fraternité de la maison.

-127-

L’abbé consulte son conseil selon le droit uni­versel et le droit propre, entre autres pour : nommer les officiers conventuels selon le droit propre (cérémoniaire, hôtelier, maître de chœur, secrétaire, bibliothécaire, infirmier, sacristain ou autres); assigner un membre à un prieuré ou un mi­nistère; admettre un membre aux ministères institués; admettre la présence d’un hôte pour une certaine durée.

d) Le prieur conventuel [47]
-128-

Le prieur conventuel est le «premier des frères». Il est l’auxiliaire principal de l’abbé, dont il est aussi conseiller de droit : il est donc nécessaire qu’il soit en profonde harmonie avec lui, afin de le soutenir ou de l’avertir si besoin est.

-129-

Le prieur conventuel est un prêtre profès so­lennel de la maison autonome, nommé par l’abbé pour trois ans renouvelables, après consultation du chapitre plénier. Il reçoit de l’abbé les pouvoirs néces­saires à sa charge.

-130-

Lorsque l’abbé est absent, le prieur conventuel tient sa place, et tous les officiers conventuels se réfè­rent à lui comme à l’abbé. Il règle les affaires trop ur­gentes pour attendre le retour de l’abbé selon les intentions de ce dernier. Lorsque l’abbé est empêché, le prieur conventuel assume la charge abbatiale en tant que vicaire[48].

-131-

Pendant la vacance de l’abbatiat, qui ne peut excéder trois mois[49], le prieur conventuel expédie les affaires courantes en tant que vicaire, prépare et con­voque le chapitre plénier appelé à élire le supérieur majeur. Dès l’élection, sa charge priorale prend fin, mais il est rééligible.

-132-

Le prieur conventuel est surtout chargé de veiller à la vie religieuse et aux ministères confiés à la communauté. À ce double titre, il vérifie que tous les confrères de la maison autonome suivent fidèlement les exigences spirituelles et temporelles de leur consécration, et s’assure de la qualité des ministères pastoraux. Cette tâche fait de lui un acteur essentiel dans les relations entre la maison autonome et les Églises locales où elle est implantée[50].

-133-

Quant à l’exercice de sa charge auprès des confrères vivant dans un prieuré, le prieur conventuel s’en remet ordinairement au prieur forain. Néan­moins, il visite périodiquement les prieurés, où il aborde les questions relatives à la vie religieuse et aux ministères pastoraux qui leur sont propres.

-134-

En son absence ou selon sa délégation, sa charge repose sur le sous-prieur : il s’agit d’un prêtre profès solennel de la maison autonome, nommé par l’abbé pour trois ans renouvelables, après consulta­tion du chapitre plénier; il est membre de droit du conseil de l’abbé.

e) Le prieuré
-135-

Le prieuré est une maison stable qui dépend de sa maison-mère, et qui a pour supérieur son prieur forain. Il est érigé par l’abbé avec le consentement du chapitre plénier et l’approbation écrite de l’évêque du lieu où il est implanté. Il est supprimé de la même manière, mais après consultation des confrères qui y vivent et de l’évêque du lieu.

-136-

Pour pouvoir assumer la double priorité consti­tuée par la vie religieuse canoniale et le ministère pastoral, le prieuré comporte au moins cinq confrè­res, dont trois profès solennels, sauf dérogation accordée exceptionnellement par l’abbé avec le consen­tement de son conseil. Un confrère est assigné au prieuré ou déplacé par l’abbé après consultation de l’intéressé, du conseil et des prieurs forains concer­nés.

-137-

Comme la maison-mère et en profonde union avec elle, le prieuré est un lieu de communion frater­nelle, portant le témoignage de la vie consacrée dont dépend sa fécondité apostolique. Cette communion s’exerce habituellement au prieuré par la fidèle parti­cipation des confrères à la vie commune familiale et liturgique, par un vrai soutien réciproque dans les charges pastorales, par la loyauté et la confiance des rapports que les confrères ont entre eux et avec le prieur forain.

-138-

Cette communion s’exerce périodiquement à la maison-mère à l’occasion des chapitres pléniers, dont la célébration donne aux confrères la possibilité et le devoir de mettre pratiquement en œuvre leur respon­sabilité personnelle vis-à-vis du bien de la famille en­tière. Elle se vérifie aussi lors des séjours qu’ils y font périodiquement selon le droit propre.

f) Le prieur forain
-139-

Le prieur forain est un prêtre profès solennel de la maison autonome nommé par l’abbé, avec le consentement de son conseil et après consultation de l’intéressé et des membres du prieuré, pour trois ans renouvelables. Il est relevé de sa charge de la même manière, et l’évêque du lieu en est informé.

-140-

Par sa charge, délimitée par le droit propre, et restant sauve l’entière responsabilité des supérieurs de la maison autonome, il exerce auprès de ses frères du prieuré le ministère d’enseignement, de gouver­nement et de sanctification au nom de l’abbé, et remplace habituellement le prieur conventuel pour ce qui concerne la vie religieuse et la qualité du minis­tère pastoral. C’est pourquoi tous les confrères du prieuré se réfèrent à lui en première instance pour ce qui est des permissions à obtenir, des comptes à ren­dre ou des difficultés à résoudre.

-141-

En tant que premier responsable local de la communion fraternelle, le prieur forain réunit réguliè­rement ses confrères pour promouvoir, en un dialo­gue sincère et confiant, la charité et la fidélité de tous, le partage des soucis et des joies, la répartition des tâches familiales et pastorales. Quant aux ques­tions financières, il est souhaitable qu’il nomme un économe qui, sous sa responsabilité, tient les comp­tes de la communauté.

g) Le prieuré lointain [51]
-142-

Les profès solennels d’un prieuré établi dans un pays lointain peuvent, avec le consentement du chapitre plénier de la maison autonome dont ils dé­pendent, se voir accorder par l’abbé certaines facultés normalement réservées au chapitre plénier ou au conseil de l’abbé, telles que l’admission aux différen­tes étapes de la vie religieuse, le consentement requis pour la nomination du prieur forain, la consultation requise pour l’assignation à des ministères.

h) Les membres vivant hors d'une maison [52]
-143-

Compte tenu de l’importance de la commu­nauté dans notre genre de vie, tous les confrères de notre congrégation résident habituellement dans une maison-mère ou l’un de ses prieurés[53]. Il est cepen­dant possible exceptionnellement, pour de sérieuses raisons de santé, d’études ou de ministères à exercer au nom de la congrégation, qu’un confrère vive plus d’un an hors d’une de ces maisons : selon le cas, avec le consentement de son conseil, l’abbé lui en donne le mandat ou la permission pour une durée déterminée selon le droit propre[54].

-144-

Le confrère ainsi détaché n’en reste pas moins lié à sa maison de profession; il demeure dans une réelle communion avec ses frères et avec ses supé­rieurs, qui le rencontrent périodiquement. Il rend compte à son supérieur (l’abbé ou le prieur forain, selon les cas) de ses activités et de sa gestion, parti­cipe aux chapitres, et revient régulièrement à la mai­son dont il dépend. Conscient de la valeur des exigences de sa consécration religieuse, il est fidèle à l’oraison et à l’office des heures, qu’il célèbre en union avec ses confrères : ceux-ci exercent à son égard, en toutes circonstances, une profonde charité.

________________________

[1] cf. Jean-Paul II, Christi Fideles Laici 19 [2] cf. Synode romain de 1985, Rapport final, C1 [3] cf. Luc Verheijen, o.s.a., Nouvelle approche de la Règle de S. Augustin T.1, Vie Monastique ed. Bellefontaine 1980, p. 47 [4] cf. ps.132,1 [5] S. Augustin, Sermo 355 [6] cf. C.I.C. can. 204-205 [7] S. Augustin, De Trinitate VIII, 8-l2 [8] ps.106,43 [9] S. Augustin, Sermo 355 [10] S. Augustin, De Mor.Eccl. XXVI, 48-49 [11] La Règle de S. Augustin, trad. A.Sage, A.A., La vie augustinienne, Paris 1971, II, 5-7, pp. 26-27 [12] Dans la première Église de Jérusalem, tous, d’un seul coeur, fréquentaient assidûment le Temple et rompaient le pain dans leurs maisons, prenant leur nourriture avec allégresse et simplicité de coeur (Ac 2,46). Suivant cet exemple, la vie fraternelle canoniale se réalise surtout aux offices et aux repas (cf. Vita Possidii n°22). [13] S. Augustin, De Mor.Eccl. XXXIII, 73 [14] cf. C.I.C. can. 607 [15] cf. C.I.C. can. 588 [16] cf. C.I.C. can. 589 [17] cf. C.I.C. can. 591 [18] cf. C.I.C. can. 114 [19] cf. Constitutions de la Congrégation de Windesheim-Saint-Victor, 1987, n°111, et C.I.C. can. 119 [20] cf. Constitutions des Chanoines réguliers du Grand-Saint-Bernard, n°C.106 [21] cf. C.I.C. can. 613 [22] cf. C.I.C. can. 609-611 [23] cf. C.I.C. can. 616 [24] cf. C.I.C. can. 613 §2; 620 [25] S. Augustin, Serm.340,1 [26] cf. C.I.C. can. 618 [27] cf. Sermo 296,5 & 339,4 [28] cf. C.I.C. can. 617 [29] cf. C.I.C. can. 618-619 [30] cf. C.I.C. can. 618; 619; cf. S. Augustin, Sermo 17,2; cf. S. Augustin, En. in ps. 44,17 : Non regit qui non corrigit [31] cf. C.I.C. can. 629 [32] cf. C.I.C. can. 626 [33] cf. Constitutions de la Congrégation de Windesheim-Saint-Victor, 1987, n°183 et suivants [34] cf. C.I.C. can. 623 [35] cf. C.I.C. can. 624 §1 [36] cf. C.I.C. can. 625 §3 [37] cf. C.I.C. can. 615 [38] cf. C.I.C. can. 624 §3 [39] cf. C.I.C. can. 354; 401; 411; 538; etc. [40] cf. C.I.C. can. 503 [41] cf. C.I.C. can. 633 [42] cf. C.I.C. can. 166 [43] cf. C.I.C. can. 169 [44] cf. C.I.C. can. 173 [45] cf. C.I.C. can. 627 [46] cf. C.I.C. can. 684-704 [47] cf. Constitutions de la Congrégation de Windesheim-Saint-Victor, 1987, n°173-l77 [48] cf. analogiquement C.I.C. can. 412-415 sur l’empêchement du siège épisco­pal [49] cf. C.I.C. can. 165 [50] cf. Mutuae Relationes 1978 (in Religieux dans la mission de l’Eglise, Le Centurion 1984) [51] cf. Constitutions de la Congrégation de Subiaco, OSB, n°73 [52] cf. Constitutions de la Congrégation de Windesheim-Saint-Victor, 1987, n°182 [53] cf. C.I.C. can. 607 [54] cf. C.I.C. can. 665 §1

III. LA CONGREGATION DE SAINT-VICTOR

-145-

La congrégation de Saint-Victor, dans son désir ancien et durable d’être en son temps signe et réali­sation du mystère de l’Église, veut être un lieu où s’exerce la «pluriformité dans l’unité»[1]. Si elle existe dans et à travers les maisons autonomes qui la com­posent, elle n’en est pas moins la source et le garant de leur unité dans la charité et de leur fidélité au charisme fondateur.

-146-

Pour permettre le maintien de son identité pro­pre, la congrégation est soumise à l’abbé général, qui en est le modérateur suprême, assisté dans sa charge par le conseil général.

-147-

Quand la congrégation est constituée d’une seule maison autonome, le supérieur majeur de la maison est le modérateur suprême; le chapitre plénier tient lieu de chapitre général; le conseil de l’abbé, de conseil général; le prieur conventuel, de premier conseiller.

1. L’abbé général [2]

-148-

L’abbé général gouverne la congrégation, ayant sur les maisons autonomes et sur leurs membres la juridiction que lui reconnaît le droit[3], restant sauve la juste autonomie qui protège la diversité des mai­sons et la juridiction immédiate des supérieurs majeurs. Il dispose des moyens nécessaires pour pro­mouvoir et vérifier dans les maisons autonomes la mise en œuvre de l’esprit canonial victorin qui se dégage de la volonté des fondateurs et des saines traditions. Il est le premier responsable du maintien de la charité entre les maisons et entre leurs membres, et de leur soutien réciproque, tant spirituel que matériel.

-149-

L’abbé général est élu à la majorité des deux tiers par le chapitre général parmi les abbés en exer­cice de la congrégation, pour six ans renouvelables. Après trois tours sans effet, il est élu à la majorité absolue. L’élection n’a pas lieu pendant la vacance du siège abbatial d’une maison autonome.

-150-

Il préside et confirme l’élection des supérieurs majeurs sans prendre part au vote. Il arbitre les diffé­rends qui peuvent opposer un confrère à son supé­rieur majeur[4]. Il est seul habilité à transmettre les recours adressés au Saint-Siège. Dans la maison dont il est l’abbé, l’arbitrage et les recours sont assu­rés par deux des visiteurs élus.

-151-

Il convoque et préside le chapitre général selon le droit propre, en établit l’ordre du jour en tenant compte des propositions de ses membres. Il nomme le premier conseiller et son suppléant après consulta­tion du chapitre général. Le premier conseiller tient la place de l’abbé général en cas d’empêchement ou de vacance de l’abbatiat général. S’il est choisi hors du chapitre général, il en fait partie de par sa charge, qui cesse à l’élection de l’abbé général. L’abbé général nomme l’économe général et son suppléant pour six ans renouvelables, avec l’approbation du chapitre général.

-152-

Pour cause très grave, sur proposition de deux visiteurs et après consultation du chapitre plénier de chaque maison autonome, l’abbé général peut être déposé par le chapitre général à la majorité des deux tiers, avec l’approbation du Saint-Siège.

-153-

En cours de mandat, l’abbé général peut pré­senter sa démission au Saint-Siège, après consulta­tion du conseil général.

2. Le chapitre général

-154-

Le chapitre général, quand il se réunit, est l’au­torité suprême de la congrégation et l’expression de son unité. Il a surtout pour mission de protéger le pa­trimoine de l’Institut et de promouvoir sa rénovation et son adaptation selon ce patrimoine[5]. Le chapitre général ordinaire est célébré tous les six ans. Il élit pour six ans renouvelables l’abbé général, les conseillers, leurs suppléants et les visiteurs autres que le premier conseiller, les représentants au conseil primatial de la confédération des Chanoines réguliers. En cas de nécessité, l’abbé général, avec le consente­ment de son conseil, peut convoquer des chapitres généraux extraordinaires.

-155-

Le chapitre général est composé des membres de droit que sont l’abbé général, les conseillers géné­raux, les supérieurs majeurs, le prieur conventuel de la maison dont l’abbé est abbé général, ainsi que des membres élus que sont les délégués de chacune des maisons autonomes. Le nombre des délégués ne doit pas être inférieur à celui des membres de droit. Les délégués sont élus par chaque chapitre plénier parmi ses membres, en proportion du nombre de profès solennels, selon le droit propre.

-156-

Le consentement du chapitre général est requis selon le droit, entre autres pour modifier le coutumier général, après consultation des chapitres pléniers.

3. Le conseil général

-157-

Le conseil général assiste l’abbé général dans tous les actes pour lesquels son consentement ou son avis sont requis par le droit universel et le droit pro­pre. Il est composé du premier conseiller et de trois autres conseillers élus par le chapitre général parmi ses membres. Leur charge cesse à l’élection du nouvel abbé général.

-158-

Le consentement du conseil général, en plus des mentions faites par ailleurs, est requis selon le droit propre pour : accepter le passage d’un profès solennel vers un autre institut ou venant d’un autre insti­tut[6]; concéder un indult d’exclaustration selon le can. 686§3; renvoyer un membre[7].

4. La visite [8]

-159-

La visite canonique est l’un des moyens principaux dont dispose l’abbé général pour promouvoir et vérifier la communion fraternelle dans l’esprit canonial victorin, entre les confrères des maisons auto­nomes comme entre ces maisons elles-mêmes. C’est pourquoi, au temps et selon des modalités fixés par le droit propre[9], mais au moins une fois tous les six ans, il lui revient d’effectuer la visite canonique reli­gieuse dans les maisons de la congrégation, accom­pagné du premier conseiller, ou éventuellement de celui qu’il choisit parmi les autres visiteurs.

-160-

Quand l’abbé général est empêché ou s’il le juge utile, il peut déléguer le premier conseiller et l’un des visiteurs élus, ou deux visiteurs élus. La charge des visiteurs élus cesse avec celle de l’abbé général.

-161-

Selon les circonstances, dans le but de préser­ver la fonction de recours de la visite, surtout en ce qui concerne la maison dont l’abbé général est le supérieur majeur, le chapitre général peut choisir des visiteurs en dehors des membres de la congrégation, pourvu qu’ils soient prêtres et connaissent suffisam­ment l’esprit canonial victorin pour exercer avec fruit ce ministère de vigilance interne.

-162-

Après la visite, selon le droit propre, les visiteurs rendent compte de leur mission au conseil général, et remettent leur rapport au chapitre plénier de la maison visitée.

5. L’administration des biens temporels [10]

-163-

La congrégation, les maisons autonomes et les prieurés, en tant que personnes juridiques de plein droit, sont capables d’acquérir, de posséder, d’admi­nistrer et d’aliéner des biens temporels[11], tenant compte des lois canoniques et civiles.

-164-

Chaque personne juridique doit avoir un éco­nome qui administre les biens sous la direction du supérieur respectif. Cet économe est toujours diffé­rent du supérieur majeur, et même, autant que possible, d’un autre supérieur de maison[12]. Pour la maison autonome, l’économe est nommé par l’abbé avec le consentement de son conseil pour trois ans renouvelables, et rend annuellement les comptes de toute la maison au chapitre plénier.

-165-

Le témoignage de la pauvreté évangélique, tel qu’il nous a été donné par les apôtres et la première communauté de Jérusalem, fait partie de la vie reli­gieuse canoniale et de sa fécondité apostolique. C’est pourquoi la rigueur dans l’administration et l’usage des biens temporels constitue un grave devoir pour tous, et en particulier pour les supérieurs et les économes[13].

-166-

L’autonomie de nos maisons implique l’auto­nomie financière. Il est cependant de la nature de no­tre communion fraternelle qu’une maison autonome en difficulté puisse compter sur l’aide provisoire des autres maisons : les modalités de cette aide sont dé­terminées par l’abbé général avec le consentement du conseil général et des chapitres pléniers des maisons autonomes ainsi sollicitées.

-167-

Après l’élection de l’abbé général et des conseillers, le chapitre général approuve le rapport sur l’état financier de la congrégation présenté par l’économe général, puis approuve la nomination de l’économe général, et fixe à chaque maison autonome les limites financières de sa compétence. Pour les affaires dépassant les limites fixées, le chapitre général est convoqué[14].

-168-

Le chapitre général peut, selon le droit propre, solliciter une contribution de toutes les maisons autonomes, compte tenu des possibilités de chacune, pour les dépenses générales de la congrégation[15].

-169-

Dans toutes les maisons autonomes, les dons en nature ou en espèces sont remis au supérieur, qui en dispose selon son jugement pour le bien de tous. La constitution d’un pécule à usage personnel est radicalement contraire à notre genre de vie : la pau­vreté est une condition nécessaire à la liberté de notre don au service des frères et de toute l’Église. Quant aux nécessités imposées par les charges ou les minis­tères, chaque confrère en rend compte.

6. La législation de la congrégation [16]

-170-

L’interprétation authentique des constitutions n’appartient qu’au Saint-Siège.

-171-

Tous les supérieurs, abbés, prieurs administra­teurs, prieurs conventuels ou prieurs forains, peu­vent dispenser les confrères qui leur sont soumis des normes disciplinaires des constitutions et coutu­miers, pour une juste cause et une durée déterminée.

-172-

Il revient à l’abbé général, après avoir entendu son conseil, de proposer aux chapitres pléniers de toutes les maisons autonomes des modifications aux constitutions. Il lui revient aussi de présenter au Saint-Siège ces demandes de modifications, qui auront été approuvées par chaque chapitre plénier à la majorité des deux tiers, puis par le chapitre général, à la même majorité.

-173-

Les constitutions sont la loi fondamentale de la congrégation et, en tant que telle, elles obligent cha­que religieux[17]. Elles sont complétées par le coutu­mier général, pour ce qui est des normes, rites et cou­tumes laissés à l’appréciation de la congrégation, en particulier les modalités et les durées non précisées dans les présentes constitutions.

-174-

De même que la Règle, les constitutions sont lues publiquement et périodiquement devant tous les confrères, et doivent être suffisamment connues de tous ceux qui se préparent à un engagement dans la communauté.

-175-

Toute règle, toute mesure de discipline ecclé­siastique qui s’inspire de la piété doit avoir en vue avant tout l’unité de l’esprit par le lien de la paix[18]. Ce lien de la paix, l’Apôtre ordonne de le sauvegarder par le support mutuel[19], et tout remède punitif qui aurait pour effet de le briser s’avérerait non seulement superflu, mais néfaste, et par là même ne serait pas un remède.[20]

III. LA MISSION CANONIALE

-176-

Envoyée par Dieu aux peuples pour être le ‘sacrement universel du salut’, l’Église, en vertu des exi­gences de sa propre catholicité et obéissant au com­mandement de son fondateur[21], est tendue de tout son être vers la prédication de l’Évangile à tous les hommes[22].

-177-

Vouée au service de l’Église, notre famille canoniale entend se consacrer de toutes ses forces au bien des Églises particulières auxquelles elle est atta­chée, et servir de la même manière l’Église univer­selle[23]. L’obéissance de chaque confrère au Souve­rain Pontife comme à son supérieur le plus élevé manifeste notre volonté de servir Dieu et l’Église tout entière[24]. Dans le même esprit, tous les supérieurs majeurs, une fois leur élection acceptée, émettent personnellement la profession de foi selon la formule approuvée par le Saint-Siège[25].

I. APPEL A LA MISSION

-178-

Au cours de l’histoire, l’abbaye, puis la congré­gation de Saint-Victor, ont compris les fonctions pas­torales comme appartenant aux exigences de la vie religieuse canoniale, personnelle et communautaire. La prière liturgique, l’étude et l’enseignement, l’au­mônerie des étudiants, l’hospitalité, la prise en charge des paroisses jusqu’en des terres alors de mission, témoignent de la diversité d’un apostolat lié aux ori­gines : l’évêque Augustin fonda à Hippone un monas­tère de clercs pour répondre aux besoins de l’Église et du monde de son temps[26].

-179-

Aujourd’hui comme hier, les chanoines de Saint-Victor sont attentifs aux besoins du monde : Les joies et les espoirs, les tristesses et les angoisses des hommes de ce temps, des pauvres surtout, et de tous ceux qui souffrent, sont aussi les joies et les espoirs, les tristesses et les angoisses des disciples du Christ, et il n’est rien de vraiment humain qui ne trouve d’écho dans leur cœur[27]. Si la mission est toujours la même, les conditions humaines et ecclésiales dans lesquelles elle s’exerce ne cessent de changer[28].

-180-

Ces changements conduisent à écouter les appels actuels des pasteurs relatifs à cette priorité de l’Église qu’est la mission : Dieu ouvre à l’Église les horizons d’une humanité plus disposée à recevoir la semence évangélique (…) Le moment est venu d’enga­ger toutes les forces ecclésiales dans la nouvelle évan­gélisation et dans la mission «ad gentes». Aucun de ceux qui croient au Christ, aucune institution de l’Église ne peut se soustraire à ce devoir suprême : annoncer l’Évangile[29].

-181-

Unis au Siège de Pierre, les successeurs des apôtres associent les religieux au dynamisme mis­sionnaire. Don de Dieu à l’Église pour sa mission dans le monde, la vie religieuse est appelée à trouver de nouvelles voies d’évangélisation dans la fidélité aux charismes fondateurs[30].

II. FORMATION A LA MISSION

-182-

Les confrères de nos maisons sont formés dans le but de répondre au mieux à leur vocation, où apos­tolat et vie religieuse sont étroitement liés : l’apostolat de tous les religieux consiste en premier lieu dans le témoignage de leur vie consacrée[31]. Toute la vie des membres doit être imprégnée d’esprit apostolique, et toute leur action apostolique doit être animée par l’esprit religieux[32].

-183-

Il importe que ceux qui veulent faire l’essai de notre genre de vie manifestent le désir de participer activement et avec zèle au projet d’un ordre religieux apostolique. Les confrères débutants ou avancés dans le ministère sont invités à développer l’unité or­ganique entre la vie de prière, la vie communautaire et l’apostolat. Leur voie de perfection consiste à s’of­frir tout entiers à la suite du Bon Pasteur[33].

-184-

Enfin, la dimension missionnaire exige un effort durable de formation permanente: les temps de res­sourcement, de réflexion et d’étude organisés par la congrégation et les diocèses sont des moyens indis­pensables pour garder la fidélité nécessaire au minis­tère et raviver constamment le sens de la mission[34].

III. LA MISSION, SOURCE ET EXPRESSION DE LA COMMUNAUTE

-185-

La vie contemplative mixte, vécue par les cha­noines réguliers, est la vie même de l’Église[35]. Elle fut par excellence la vie du Seigneur, qui en fit don au collège des apôtres : Il en établit douze pour être avec lui et pour les envoyer prêcher[36]. Aussi saint Augus­tin considère-t-il l’Église avant tout comme une fra­ternité rayonnante, et non comme une juxtaposition d’individualités, aussi remarquables soient-elles[37].

-186-

La mission de la communauté canoniale est une participation à celle de l’Église. De cette partici­pation, la communauté reçoit sa raison d’être et sa cohésion : La communauté est constituée et le de­meure, non parce que ses membres se trouvent heu­reux ensemble par affinité de pensée, de caractère ou d’options, mais parce que le Seigneur les a rassemblés et les tient unis par une commune consécration, et pour une mission commune dans l’Église[38]. En ce sens, la mission est source de la communauté.

-187-

Réciproquement, la communauté est la source de la mission de chacun de ses membres : même lorsqu’il agit seul, aucun n’agit en son nom perso­nnel, et tous s’efforcent de travailler en commun. Le principe en est donné par la Règle : Tout d’abord, puisque vous êtes réunis en communauté, habitez d’un parfait accord en la maison[39], n’ayez qu’un cœur et qu’une âme tendus vers Dieu[40]-[41]. Nos pères victo­rins en donnent un exemple : pour eux, l’étude com­munautaire de la Bible, par ailleurs méditée, chantée, célébrée et prêchée, s’épanouit en une contemplation de type augustinien, destinée à l’ensemble des bapti­sés[42].

-188-

Fondées sur la mission salvifique de l’Église, les activités de nos maisons sont variées : le service des paroisses et les aumôneries, l’enseignement et la prédication, la formation aux valeurs morales, la célébration des sacrements et l’accompagnement qu’ils requièrent, le service des plus pauvres, l’accueil et l’hospitalité, l’attention à toute personne humaine, le dialogue œcuménique et interreligieux, comptent parmi les éléments constitutifs de l’évangélisation à laquelle les chanoines veulent participer pleinement.

IV. LE CHARISME MISSIONNAIRE

-189-

Chaque confrère est conscient de sa respon­sabilité apostolique et du retentissement de cette mission sur sa propre vie, suivant la parole de saint Augustin : Je vous sers une alimentation dont je vis moi-même, je mets sur votre table les aliments dont je me rassasie moi-même[43].

-190-

Il y a diversité des dons de la grâce, mais c’est le même Esprit; diversité de ministères, mais c’est le même Seigneur; diversité de modes d’action, mais c’est le même Dieu qui, en tous, met tout en œuvre[44]. Les appels et aptitudes sont différents; il convient d’en reconnaître la légitimité et de ne pas en établir une hié­rarchie : Vivez donc dans l’unité des esprits et des cœurs, et honorez mutuellement en vous Dieu dont vous avez été faits les temples[45].

-191-

Les supérieurs ont pour tâche de discerner les dons de chaque confrère; par là, ils aident à l’épa­nouissement de ceux dont ils ont reçu la charge, et contribuent au bien de la famille entière. Dans les mesures qu’ils prennent et les propositions qu’ils font, ils sont guidés par le sens de l’Église en son corps tout entier. Quant aux religieux, ils acceptent dans ce même esprit «d’obéissance apostolique»[46] ce qui leur est demandé ou suggéré, au besoin dans l’abandon de leurs conceptions personnelles : tous les confrères participent à l’apostolat selon leurs charis­mes et l’appel aux ministères qu’ils ont reçu.

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Les études complémentaires, les formations professionnelles adaptées et les activités qui en résul­tent développent les facultés propres à chaque confrère, lui permettent de trouver sa place[47], et favorisent l’union entre son appartenance au Christ et le service de ses frères : l’activité pour le Seigneur ne cessera de les conduire au Seigneur, source de toute activité. Une mission communautaire enracinée dans la tradition canoniale et ouverte aux voies nouvelles que l’Esprit suggère à l’Église, demande aussi la promotion des dons particuliers.

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Les exigences de la mission peuvent amener les supérieurs à envoyer certains membres en dehors de la communauté pour des services précis : recherches liées au patrimoine de l’Église et de notre congréga­tion, engagements particuliers, stages ou aides temporaires.

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Quels que soient les ministères, la spécificité religieuse canoniale doit être préservée et mise en œuvre selon les critères développés dans «La forma­tion dans les instituts religieux»[48], à savoir : considérer que le ministère pastoral fait partie de la nature de la vie religieuse canoniale; mener une vie spirituelle inspirée par le témoi­gnage et l’enseignement de saint Augustin, par notre héritage canonial, et en conformité avec la Règle; faire droit aux exigences concrètes de la vie quotidienne commune et liturgique; accepter la disponibilité et la mobilité pour le service de l’Église universelle.

V. FÉCONDITÉ DE LA MISSION

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Les ministères se développent habituellement à partir des maisons canoniales. Selon le droit propre, il revient aux supérieurs de faire régulièrement le point avec tous les confrères sur leurs activités pastorales, afin de soutenir, stimuler et corriger au besoin : une réflexion commune périodique sur des sujets précis favorise l’échange, renforce les liens et l’attention mu­tuels, et permet de chercher ensemble les réponses les plus appropriées aux attentes de l’Église et du monde.

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La majeure partie des actes pastoraux, restant sauve la vie interne de nos maisons, est placée sous la responsabilité directe des évêques des diocèses dans lesquels nous travaillons : Les religieux prêtres sont les collaborateurs de l’ordre épiscopal (…) À un certain titre véridique, ils appartiennent au clergé du diocèse[49]. Selon l’exemple des clercs réunis à Hip­pone autour de leur évêque Augustin, et fidèles à leur origine qui faisait d’eux la «part régulière du presby­terium», les chanoines réguliers sont particulièrement attentifs à leur intégration dans les Églises locales[50].

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Pour répondre au mieux aux demandes des Églises locales, il est nécessaire d’effectuer un discer­nement qui tienne compte de notre mode de vie, des confrères disponibles, du caractère canonial de nou­velles charges, et du souhait de l’Église d’une meilleure répartition des prêtres. C’est pourquoi toute nouvelle implantation canoniale requiert des modali­tés préalables précisées par le droit propre.

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Le souci d’une juste répartition du clergé incite à entendre les appels émanant des jeunes Églises. La congrégation de Saint-Victor souhaite que la vie canoniale s’étende par des fondations dans ces pays d’évangélisation relativement récente : À faire partie du peuple de Dieu, tous les hommes sont appelés. C’est pourquoi ce peuple, demeurant un et unique, est destiné à se dilater aux dimensions de l’univers entier et à toute la suite des siècles[51].

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L’extension de la vie canoniale au cours de l’histoire s’est souvent appuyée sur des pierres d’at­tente : en un siècle, une quarantaine d’abbayes naquirent de Saint-Victor ou lui furent rattachées. La même perspective conduit à susciter ou aider la nais­sance de maisons de chanoines réguliers issus de toutes nations, races, peuples et langues[52], tant il est vrai que la forme de vie commune préconisée par saint Augustin peut être reçue par tous[53].

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Dans cette diffusion, les chanoines réguliers se veulent respectueux des identités culturelles qu’ils rencontrent : Par l’inculturation, l’Église incarne l’Évangile dans les diverses cultures, et en même temps, elle introduit les peuples avec leur culture dans sa propre communauté, elle leur transmet ses valeurs en assurant ce qu’il y a de bon dans ces cultures, et en les renouvelant de l’intérieur. Pour sa part, l’Église, par l’inculturation, devient un signe plus compréhensible de ce qu’elle est, et un instrument plus adapté à sa mission[54].

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Dans les pays «de vieille chrétienté», la pasto­rale est également d’essence missionnaire, car elle s’adresse à ceux qui croient, ceux qui ne croient pas et ceux qui ne croient plus[55]. L’évolution des socié­tés occidentales dans leurs rythmes de vie et leurs mœurs se fait le plus souvent en dehors de toute réfé­rence chrétienne. De plus, la complexité croissante des situations exige de la part des ouvriers de l’Évangile un éventail de compétences difficiles à assimiler en totalité.

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Dans ce contexte, la communauté canoniale peut porter ce qui serait trop lourd pour un seul : la charité qui y règne pousse chacun de ses membres à dépasser ses vues personnelles et à compter sur les aptitudes de tous. Dans la mesure où vous prendrez plus de soin du bien commun que de vos affaires per­sonnelles, vous connaîtrez vos plus sensibles progrès. Que l’emporte donc sur toutes les nécessités qui pas­sent, la charité qui demeure[56].

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Comme chanoines réguliers, puissions-nous demeurer dans la joie sur le chemin[57] que nous a montré notre père Augustin : Ce que tu feras, c’est l’Église qui le fera, et tu le feras pour l’amour de cette Église dont tu es le fils[58].

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[1] cf. Synode romain de 1985, Rapport final, C2 [2] cf. Constitutions des Chanoines réguliers de la Congrégation d’Autriche [3] cf. C.I.C. can. 620&622 [4] cf. C.I.C. can. 1427 [5] cf. C.I.C. can. 631 §1 [6] cf. C.I.C. can. 686 §1 [7] cf. C.I.C. can. 699 [8] cf. Constitutions de la Congrégation de Windesheim-Saint-Victor, 1987, n°150-155, et C.I.C. can. 628 [9] cf. C.I.C. can. 628 §1 [10] cf. Constitutions de la Congrégation de Windesheim-Saint-Victor, 1987, n°191-203; cf. C.I.C. can. 634-640; cf. C.I.C. livre V, C.I.C. can. 1273-1289, surtout C.I.C. can. 1284 [11] cf. Constitutions de la Congrégation de Windesheim-Saint-Victor, 1987, n°192 [12] cf. Constitutions de la Congrégation de Windesheim-Saint-Victor, 1987, n°193 [13] cf. C.I.C. can. 600, 634 §2, 640 [14] cf. Constitutions de la Congrégation de Saint-Maurice, n°176; cf. C.I.C. can. 638 [15] cf. Constitutions de la Congrégation de Windesheim-Saint-Victor, 1987, n°202 [16] cf. Constitutions de la Congrégation de Windesheim-Saint-Victor, 1987, n°204-209 [17] cf. Constitutions des Chanoines réguliers du Grand-Saint-Bernard, C.157 [18] cf. Eph 4,3 [19] cf. Eph 4,2 [20] S. Augustin, Contra epistulam Parmeniani, Livre III, I,1, Oeuvres de S. Au­gustin 28, Traités anti-donatistes V.1, DDB 1963, p.385 [21] cf. Mc 16,l5 [22] cf. Ad Gentes 1 [23] cf. Déclaration du Conseil primatial de la Confédération, 1969, III,19 [24] cf. C.I.C. can. 590 §2 [25] cf. C.I.C. can. 833 §8 [26] cf. S. Augustin, “Sermo” 355, 1-2 : …je vis la nécessité pour un évêque d’of­frir sans cesse l’hospitalité à tout venant, aux gens de passage. Je me dis que si un évêque manquait à ce devoir, il se ferait une réputation d’homme inhospita­lier, et que s’il autorisait ces pratiques dans un monastère, ce serait une incon­venance. Voilà pourquoi j’ai voulu avoir avec moi dans la maison épiscopale un monastère de clercs. [27] cf. Gaudium et spes 1 [28] cf. Ad Gentes 6 [29] cf. Jean Paul II, La Mission du Rédempteur, Introduction [30] cf. Religieux et religieuses dans l’Eglise en mission, document de la Confé­rence épiscopale française, 28/10/85 : Au sein du peuple des baptisés, la vie re­ligieuse est un don de Dieu à l’Eglise pour sa mission dans le monde (…) Nous encourageons la recherche de voies nouvelles dans la fidélité au charisme des instituts. Nous ressentons la nécessité (…) de nouvelles formes de présence d’Eglise dans ce monde marqué par l’incroyance et l’indifférence, mais aussi par des signes de la présence de Dieu. Pour relever de tels défis, nous comptons sur le dynamisme des instituts et de l’ensemble de leurs membres, en particulier des jeunes sensibles aux mutations culturelles contemporaines et à l’actualité de l’Evangile dans notre monde. [31] cf. C.I.C. can. 673 [32] cf. C.I.C. can. 675 [33] cf. Pastores dabo vobis, Cerf Paris 1992, n°22, pp. 55-56 [34] cf. Jean-Paul II, Pastores dabo vobis, Cerf Paris 1992, n°75, p. 208 :  Dans l’Eglise-mission, la formation permanente du prêtre est non seulement une con­dition nécessaire, mais aussi un moyen indispensable pour raviver constamment le sens de la mission, et en garantir une réalisation fidèle et religieuse. [35] cf. C. Journet, L’occupation dominante ou la ‘forme de vie’ de l’Eglise in Etudes Carmélitaines, avril 1934, pp. 1-17, surtout pp. 8-11 [36] Mc 3,l4 [37] cf. Verheijen, Nouvelle approche de la Règle de S. Augustin, T2, Institut Historique Augustinien, Louvain 1988 [38] La formation dans les instituts religieux A.26,25 ch II, 1990 [39] cf. ps. 67,7 [40] cf. Ac 4,32 [41] La Règle de S. Augustin, trad. A.Sage, A.A., La vie augustinienne, Paris 1971, I,1, p. 23 [42] cf. Pie Duployé, L’idée canoniale in Les origines du centre de pastorale li­turgique, 1943-1944, Mulhouse-Paris-Tournai 1968, p. 153-162 [43] cf. S. Augustin, Sermo 339,4 [44] 1Cor 12,4-6 [45] La Règle de S. Augustin, trad. A.Sage, A.A., La vie augustinienne, Paris 1971, I,6, p. 25 [46] cf. Pastores dabo vobis, Cerf Paris 1992, n°28 §2, p. 73 [47] cf. C.I.C. can. 602 [48] La formation dans les instituts religieux  §108 [49] Christus Dominus 34-35, 1965 [50] cf. Mutuae relationes [51] cf. Lumen Gentium 13 [52] Ap 7,9 [53] cf. La Règle de S. Augustin, trad. A.Sage, A.A., La vie augustinienne, Paris 1971, III,4, p. 36 : Dieu vous donne d’observer toutes ces prescriptions avec amour, en religieux épris de beauté spirituelle et qui exhalent de la bonté de leur vie la bonne odeur du Christ, non en esclaves sous la loi, mais en hommes libres sous le régime de la grâce. [54] cf. Jean-Paul II, La mission du Rédempteur 52 [55] cf. Jean-Paul II, La mission du Rédempteur 33 [56] La Règle de S. Augustin, trad. A.Sage, A.A., La vie augustinienne, Paris 1971, II, 4, p. 32 [57] cf. Hugues de Saint-Victor, De laude caritatis, PL 176, c. 973A-973C [58] Lettre 134 [59] Hugues de Saint-Victor, De arrha animae, ed. K. Muller, Bonn 1913, 22-23

PRIERE FINALE

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Je confesse tes miséricordes, Seigneur mon Dieu, car tu ne m’as pas abandonné, douceur de ma vie et lumière de mes yeux. Que te rendrais-je pour tout ce que tu m’as accordé ? Tu veux que je t’aime. Et comment t’ai­merai-je et combien t’ai­merai-je ? Qui suis-je pour t’aimer ?

Et cependant je t’aimerai, Sei­gneur, ma force, mon soutien, mon refuge, mon libérateur, mon secours, mon protecteur, la corne de mon salut et mon appui (…)

Quelle que fût la direction vers laquelle je me tournais, partout ta grâce et ta miséri­corde m’y ont précédé. Bien des fois je me suis cru réduit à rien, et soudain tu m’as dégagé; quand j’errais, tu m’as ramené; quand j’étais dans l’ignorance, tu m’as instruit; quand j’étais dans le péché, tu es allé me re­chercher; quand j’étais triste, tu m’as consolé; quand je désespé­rais, tu m’as réconforté; quand j’étais tombé, tu m’as relevé; quand j’étais resté debout, tu m’as soutenu; quand je mar­chais, tu m’as conduit; quand j’ar­rivais, tu m’as accueilli.

Tu as fait tout cela pour moi, Sei­gneur mon Dieu, et bien d’autres choses encore : d’elles il me sera doux de toujours me souvenir, de toujours parler, de toujours re­mer­cier, afin de te louer et de t’aimer pour tous tes bienfaits, Seigneur mon Dieu.